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Avril 2003
Nous vivons des temps très durs
: une guerre atroce (que j'espère fini au moment où vous lirez ce
mot), des risques d'inflammation de toute une région, sans oublier tant
d'autres déchirements ailleurs dans le monde, de plus en plus d'insécurités
politiques et économiques s'ajoutent aux insécurités que
nous connaissions déjà suite à cet incroyable acte de terrorisme
qu'était " le 11 septembre ", issu à son tour de situations
de misère, d'humiliation, de frustration…
Je ne juge pas. Je
ne sais même pas comment comprendre la situation actuelle, encore moins
de désigner responsables et victimes. Ne serait ce que j'ai la forte crainte
que nous sommes tous victimes, que l'humanité est victime… puisque
c'est la peur et la haine qui se rependent. Les hommes, les peuples, les religions
s'opposent de plus en plus l'un à l'autre, accusent l'autre et se sentent
ainsi justifiés de combattre l'autre.
C'est un moment critique, qui
rappelle les mots du Christ " Vous aurez aussi à entendre parler de
guerres (…) On se dressera en effet nation contre nation (…) Et tout
cela ne fera que commencer les douleurs de l'enfantement " (Mat 24, 6-8).
Et à ce moment il me semble que le plus important soit de veiller : "
Veillez donc, parce que vous ne savez pas quel jour va venir le Maître "
(Mat 24, 42). Bien que le Christ dise également -dans ce même contexte-
de " ne pas s'alarmer, car il faut que cela arrive, mais ce n'est pas encore
la Fin " (Mat 24, 6). D'ailleurs, la Fin n'est pas forcement " la fin
de notre histoire ". C'est tout d'abord une réalité "
hors temps " comme le Paradis est plutôt une réalité
" hors monde ", le Christ disant au bon larron : " aujourd'hui
tu seras avec moi dans le Paradis " (Luc 23, 43), et par rapport au dernier
Jour " l'heure vient et est déjà venue " (Jean 5, 25).
Néanmoins, les signes sont là, " la nuit est avancée,
le Jour approche " (Rom 13, 12). C'est cela que les Offices du début
de la Grande Semaine chantent solennellement (en reprenant Mat 25) : " Voici
l'Epoux qui vient au milieu de la nuit : heureux le serviteur qu'il trouvera vigilant
! "
Résurrection de Lazare fête le samedi 19 Avril
C'est
décidément l'heure de nous préparer. Mais si l'on le fait
ce n'est pas que pour nous, que pour moi, mon âme, mon salut. Nous ne pouvons
pas vivre ces temps et ne pas prier pour le monde. Et ceci avec audace. Audace
basée sur l'expérience d'Abraham qui osait prier pour Sodome (Gen
18). Avec confiance aussi. Confiance basée sur la Résurrection,
le Christ étant descendu aux enfers pour sauver tous. C'est dans la joie
de Pâques que nous allons pouvoir prier pour ce monde et même pour
ceux qui nous haïssent :
" C'est le jour de la Résurrection,
en cette fête rayonnons,
l'un l'autre embrassons-nous, du nom de frères
appelons même nos ennemis,
pardonnons à cause de la Résurrection
" (stichères de Pâques)
Nous prions pour les autres tout
en nous rendant compte que nous ne soyons pas automatiquement du côté
des justes. C'est pourquoi nous prions actuellement, à mon initiative,
après chaque Liturgie cette prière de double tranchée :
" Seigneur, Miséricordieux, Tu as prié pour ceux qui T'ont
crucifié
et Tu as ordonné à Tes serviteurs de prier aussi
pour leurs ennemis ;
pardonne à ceux qui nous haïssent et nous
persécutent, pardonne aussi
à nous qui avons une vue étroite,
jugeons trop facilement et dédaignons nos frères
Votre père dans le Christ, Lambert