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Chaque mois, Père Lambert écrit quelques mots pour aider les paroissiens de l'église orthodoxe de Nantes
à réfléchir et progresser sur leur chemin spirituel.
Tropaire du saint et juste prêtre Alexis d'Ugine
- ton 3 -
Pasteur bien-aimé du Christ Dieu,
tu fus une règle de foi et un exemple de miséricorde.
Tu brillas par ta sollicitude envers ton troupeau à l'étranger,
et tu fus révélé comme étant glorifié par Dieu.
C'est pourquoi reposant avec ton corps dans l'incorruptibilité,
et en esprit te tenant devant le trône divin,
prie le Christ Dieu de nous affermir dans l'orthodoxie et la piété,
et de sauver nos âmes.
Le 6 mai Son Eminence Gabriel de Comane, a dédié notre nouvelle église à
Nantes aux Saints : Basile de Césarée et Alexis d'Ugine.
A cette occasion une importante relique du Saint Alexis (une mèche de ses
cheveux avec un petit bout de la peau de la tête) est déposée
dans un reliquaire sous sa nouvelle Icône à gauche dans l'Iconostase
de notre église. Comment est-elle venue là et pourquoi ?
L'histoire remonte à plus de 15 ans quand en 1990 je séjourne pendant
6 mois au Monastère de Notre Dame de Toute Protection (Pokroff) à
Bussy-en-Othe en Bourgogne. La très veille abbesse (higoumène) Theodosia
lui raconte comment elle est allée 33 ans auparavant à Ugine. Là,
le corps d'un certain père Alexis Medvedkov a été retrouvé
intact 22 ans après son inhumation (en 1934).
"C'est seulement après son décès que les médecins révèlent
que le prêtre d'Ugine souffrait en fait d'un cancer généralisé.
Ils ordonnent une mise en bière rapide et la fermeture hâtive du
cercueil, étant convaincus de la décomposition quasi-immédiate
du corps". Il est alors inhumé dans un caveau gratuit et temporaire.
Il est ensuite transféré dans un cercueil avec une concession trentenaire
acquise par la paroisse d'Ugine. Pour effectuer ce transfert, le cercueil attend
hors de terre durant trois jours. Une vingtaine d'années plus tard, en
1953, la municipalité d'Ugine décide de construire des immeubles
sur l'emplacement du cimetière communal. Des fossoyeurs travaillent chaque
jour avec pelles et pioches à exhumer les ossements des morts. "Le
22 août 1956, sous un soleil brûlant, les fossoyeurs se mettent à
l'œuvre sur la tombe de l'archiprêtre Alexis Medvedkov. Parvenus à
la profondeur d'un mètre vingt, ils se voient empêchés de
poursuivre leur travail par une force inconnue qui les oblige à poser leurs
outils et à continuer de creuser à la main. Et bientôt, à
leur immense stupéfaction, ils découvrent un homme parfaitement
intact, sans le moindre signe de corruption, comme enterré de la veille.
Son visage et ses mains sont de cire. Les vêtements sacerdotaux en brocart
blanc avec des croix dorées dont le défunt est revêtu, ainsi
que l'évangéliaire posé sur sa poitrine ne présentent
aucune altération. On vérifie l'état du tissu : il ne se
laisse pas déchirer. Seule la reliure métallique de l'évangéliaire
a noirci. Pourtant le cercueil lui-même est complètement décomposé
et la dépouille mortelle gît au contact de la terre froide et humide
depuis 22 ans. Les fossoyeurs, en proie à une grande émotion, comprennent
que cette "force inconnue" qui les a arrêtés a évité
qu'ils abîment le cadavre avec leurs instruments. On se rappelle que le
père Alexis a été mis en terre un 22 août, très
exactement vingt-deux ans plus tôt, et que les médecins avaient prédit
une décomposition immédiate de son corps…". "On appelle
un médecin, qui déclare, bouleversé : "Jamais, un homme
mort d'un cancer généralisé n'a échappé à
la décomposition. C'est un vrai miracle !"". En attendant la
réinhumation, le corps du saint Alexis reste trois jours de vrai canicule
dans le cercueil ouvert et de nombreuses personnes viennent voir ce qui c'est
passé. Le 30 septembre 1957, les fossoyeurs d'Ugine ouvrent à nouveau
la tombe du père Alexis, cette fois-ci en vue du transfert de son corps
vers la crypte de l'église de Ste Geneviève des Bois. Le cercueil
est ouvert. Plusieurs personnes accourent et voient toujours le même miracle.
Le 2 octobre 1957, arrivent sur place les représentants du Métropolite
Vladimir, le secrétaire de l'administration diocésaine, C.M. Kniazeff
et la moniale Théodosia de la communauté monastique de Bussy-en-Othe.
Ce sont eux qui accompagnent alors les reliques du Saint Alexis à Sainte
Geneviève des Bois où il reposera près de 50 ans."
L'histoire fit sur moi une forte impression , surtout que du temps de la vie du
père Alexis rien d'extraordinaire n'avait été remarqué
par ceux qui ont vécu avec lui. C'était un homme simple, humble,
priant. Un bon pasteur. Rien de spécial. Même parfois le contraire
de ce que l'on s'imagine pour un Saint. Ainsi, à Ugine, le père
Alexis a connu des moments pénibles quand une partie de la paroisse était
montée contre lui.
"Certains paroissiens ne comprennent pas le
père Alexis et ne l'aiment guère. Profitant de sa mansuétude
et de sa patience exceptionnelles, ils murmurent contre lui, se plaignant de la
longueur exagérée des offices, se moquant du piètre état
de sa soutane…" Ils vont même jusqu'à déposer une plainte
auprès de Mgr Euloge."
Mais c'est Dieu qui l'a révélé
22 ans après sa mort comme un Saint. Dieu nous fait ainsi comprendre combien
c'est grand de pouvoir vivre toutes les difficultés de la vie et de garder
confiance en Lui. Et des difficultés, il en a connu.
Né en 1867
dans un village du nord de la Russie, Fomistchevo, il perd son père, simple
prêtre de campagne, très tôt après sa naissance : la
famille se retrouve dans la misère.
Dans sa première paroisse
à Vrouda, "l'indigence de son foyer familial et le dénuement
de la paroisse l'obligent à mener de front et les devoirs de sa charge
de prêtre et tous les travaux agricoles qui emplissent la vie quotidienne
d'un paysan".
Arrive l'année 1917 : la révolution. Le
père Alexis est arrêté, jeté en prison et torturé:
ses bourreaux lui rompent les bras et les jambes, il est roué de coups
au point que son nerf facial se déchire en partie. Il est condamné
à mort."Cependant le Seigneur en décide autrement et permet
que ses enfants spirituels et sa famille interviennent pour le sauver. Sa fille
aînée s'offre pour lui en otage et obtient sa libération".
La famille s'enfuit en Estonie où le père Alexis organise une petite
paroisse pour les réfugiés russes. Il travaille en même temps
dans les mines de schiste. Le climat y est insalubre et l'air vicié. Les
conditions de travail sont si pénibles que les Estoniens s'y refusent et
préfèrent employer les fugitifs russes et les criminels estoniens
condamnés aux travaux forcés. Pour le père Alexis ceci veut
dire que sa santé se dégrade encore plus. En 1929 son épouse
meurt. La même année l'archevêque Eusèbe, tête
de l'église orthodoxe en Estonie rattachée au Patriarcat de Moscou,
meurt également. Le père Alexis perd alors tout soutien, il est
profondément seul, mis à l'écart par ses confrères
estoniens, abandonné de tous. On ne le laisse pas travailler pour l'église…
C'est ainsi qu'il demande au métropolite Euloge d'être reçu
en France.
A travers toutes ces épreuves le père Alexis ne perd
jamais sa foi. Il endure avec patience ses tortures. Il garde son "caractère
doux et effacé, modeste, presque timide et délicat et il cherche
à faire régner la paix autour de lui".
Quand le 16 janvier
2004 le Synode du Trône Patriarcale de Constantinople inscrit, à
la demande de notre Archevêque Gabriel, le père Alexis Medvedkov
sur la liste des Saints de l'Eglise, je pense tout de suite que saint Alexis devrait
devenir notre deuxième saint patron. Les préparatifs pour notre
future église devenant de plus en plus sérieux nous commençons
à prier un moleben pour Saint Basile et Saint Alexis après chaque
Liturgie pour qu'ils prient Dieu de nous venir en aide dans notre projet quelque
peu audacieux.
Arrive le mois de janvier 2005. Les murs de notre église
ont été érigés et la charpente presque finie. Mais
il se pose un grand problème. Le legs (70.000 euros) sur lequel nous comptions,
ne peut pas porter ses fruits à cause d'un problème juridique.
Nous avons épuisé toute la souscription, nos comptes bancaires sont
vides. Et pourtant, il faut prévoir une couverture pour laquelle nous avons
un devis d'autour de 10.000 euros. Quoi faire ? Nous décidons alors d'aller
en pèlerinage auprès de Saint Alexis. Le 21 janvier 2005 nous nous
rendons auprès de ses reliques au Saint Monastère de Notre Dame
de Toute Protection à Bussy-en-Othe (où elles ont été
transférées après sa canonisation). Nous prions avec ferveur
et confiance. Entre temps nous avons déjà demandé le couvreur
de commencer son travail. Quelle joie de découvrir qu'au moment de payer
la facture l'argent est là. Depuis ce moment l'argent n'a pas cessé
d'arriver - et chaque fois au bon moment!
C'est alors avec une énorme
joie que je me rends avec mes enfants à Bussy le 2 mai 2006. Il reçoit
de la mère higoumène Olga une mèche des cheveux de Saint
Alexis avec un petit bout de la peau de la tête où ils sont implantés.
C'est ainsi que le 6 mai nous déposons ses reliques sous la nouvelle
Icône et le recevons ainsi parmi nous.
Saint Alexis prie Dieu pour nous!
Archiprêtre Lambert
Ecrit d'après une vie racontée par le Monastère Notre-Dame de Toute-Protection, Bussy-en-Othe, 2004 (http://www.pagesorthodoxes.net/saints/mere-marie/alexis-d-ugine.htm).
Les citations viennent de cet article.