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Mot de Père Lambert

février 2007

Chaque mois, Père Lambert écrit quelques mots pour aider les paroissiens de l'église orthodoxe de Nantes
à réfléchir et progresser sur leur chemin spirituel.

Les lois de la République sont-elles nos lois ?(2)

Mon dernier mot a suscité de nombreuses réactions, dont certaines contestataires. Etait-ce un sujet trop sensible? Nai-je pas su m'exprimer assez clairement? La radicalité de l'Evangile fait-elle peur?
Quoi qu'il en soit, je pense intéressant d'approfondir la question, avant de passer aux deux articles qui devraient suivre, "Les modèles d'aujourd'hui sont-ils nos modèles?" et "La discipline d'autrefois est-elle notre discipline?". Non pour me justifier, mais pour mieux comprendre. Puisqu'il ne s'agit pas d'une "philosophie" sur les rapports entre "la foi" et "l'état", mais de l'Evangile et du "chemin" de notre Seigneur Jésus Christ "pour moi".
Permettez-moi de vous citer une partie d'une "lettre ouverte" envoyée par un de nos frères et paroissiens très actifs (note 1Je ne cite que la partie qui représente une réaction à mon article, laissant de coté toute l'introduction et la fin plus personnelle.) :
"Le titre de votre récente lettre pastorale donne à réfléchir : 'Les lois de la République sont-elles nos lois?' Oui, ce sont les miennes. Il est compréhensible que, citoyen d'un pays étranger (quoique européen et ami) à constitution monarchique, vous vous posiez cette question et la posiez aux paroissiens venus d'une autre pays que la France. Et, certes, la réponse que vous apportez, étayée de nombreuses citations et de copieuses notes en fin de page, nuance et atténue un peu la violence de la question. Il n'empêche. Je crains d'être, à vos yeux, coupable de pactiser avec les "diables" et, inversement, que les "diables" ne comprennent plus mon appartenance à notre Eglise, à notre paroisse nantaise".
J'aimerai répondre, cher Jean, sans me justifier, la seule chose qui importe étant le Message de l'Evangile. Je vous invite néanmoins à relire le mot attentivement. Parce que je pense que vous et d'autres ont pris peur dès le titre, craignant que dévie vers l'intégrisme et le communautarisme… Mais, croyez-moi, quand je pose une question, c'est une question, pas une question rhétorique. Et il me semble que dans l'article je réponds à la question avec "oui" et "non" ou peut-être avec un "oui mais". Mais laissons tout cela de côté pour nous concentrer sur le contenu.
Etant en France j'ai posé la question si les lois de la République sont nos lois. Si j'avais été dans mon pays j'aurais pu écrire mutatis mutandis le même article. Que je sois étranger ici et que la plupart de nos paroissiens soient étrangers, ne change rien à l'affaire. Ce qu'il faut par contre confirmer c'est que nous tous, nous sommes des étrangers: " Notre patrie n'est pas ici-bas" (Hebr. 13, 14). Nous vivons dans un pays et essayons d'y être de bons citoyens, mais nous sommes "étrangers et voyageurs" (Pierre 2, 11). Et nous y sommes appelés à obéir à des lois beaucoup plus élevées, à " la loi de l'Esprit " (Rom 8, 2) (note 2C'est ce que l'on retrouve également dans "la Lettre à Diognète") .
Ceci induit inévitablement le fait que nous ne soyons pas toujours totalement en accord avec le pays dans lequel nous vivons (note 3Ce qui est, rappelons le, aussi un droit démocratique.), que nous soyons ici depuis peu de temps ou depuis des générations. Et on pourrait alors se poser la question en quoi cela nous oblige en termes de dénonciation et d'opposition et comment. Mais je n'ai pas voulu aborder cette question, puisqu'elle est -ici et aujourd'hui- trop compliquée et épineuse. En citant la "Lettre à Diognète", j'ai simplement dit que "Les chrétiens s'acquittent de tous leurs devoirs de citoyens et supportent toutes les charges (…) Ils obéissent aux lois". Mais, et c'était cela l'objet de mon mot, "leur manière de vivre l'emporte en perfection sur elles". Le but de l'article n'était pas, comme je l'ai écrit explicitement "de mettre en cause la loi de la République, mais notre utilisation de cette loi".
Et là, je pense être en bonne compagnie, puisque n'était-ce pas un certain Jésus qui disait de "la Loi" du "Saint Peuple Elu de Dieu": "N'allez pas croire que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes: je ne suis pas venu abolir, mais accomplir (…) Car je vous le dis: si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des Pharisiens, vous n'entrerez pas dans le Royaume des Cieux. 'Vous avez entendu qu'il a été dit aux ancêtres: Tu ne tueras point; et si quelqu'un tue, il en répondra au tribunal. Eh bien! moi je vous dis: Quiconque se fâche contre son frère en répondra au tribunal (…) Vous avez entendu qu'il a été dit: tu ne commettras pas l'adultère. Eh bien! moi je vous dis: Quiconque regarde une femme pour la désirer a déjà commis, dans son cœur, l'adultère avec elle (…)" (note 4Mathieu, chapitre 5 - 7.).
C'est là toute la radicalité de notre Seigneur Jésus Christ. Mais c'est une radicalité que nous avons à appliquer à nous-mêmes et non à imposer aux autres. C'est de là que vient le fait que nous pouvons accepter des lois qui permettent beaucoup de choses que nous ne nous permettons pas: "nous obéissons aux lois mais notre comportement l'emporte en perfection sur elles".
Alors à nous, à chacun de nous, de le vivre vraiment, pleinement.

Votre père dans le Christ, Lambert

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Notes :
1- Je ne cite que la partie qui représente une réaction à mon article, laissant de coté toute l'introduction et la fin plus personnelle.
2- C'est ce que l'on retrouve également dans "la Lettre à Diognète"
3- Ce qui est, rappelons le, aussi un droit démocratique.
4- Mathieu, chapitre 5 - 7.

 

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